mercredi 7 mars 2012

Une question de timing




"Qu’importe en effet l’issue du chemin quand seul compte le chemin parcouru. On ne fait pas un voyage, le voyage nous fait et nous défait, il nous invente."
David Le Breton



Vous l'avez dorénavant bien compris, le Pacific Crest Trail ne vous laisse guère le temps de musarder en chemin. C'est tout bêtement une question de distance et de temps disponible au cours des saisons qui vous permettent raisonnablement (ou pas...) de randonner. Des données incontournables.
La "saison" PCT commence en avril et devrait se terminer fin septembre. Je dis "devrait", parce que régulièrement, certains randonneurs terminent plus tard, voire beaucoup plus tard, en novembre, avec les risques que cela implique. On a donc une fenêtre raisonnable d'environ 180 jours.
Je pose 4300 kilomètres, je divise par 180, j'obtiens 24. Cela veut dire que, mathématiquement, en maintenant un hypothétique rythme de marche parfaitement régulier, il faut parcourir 24 kilomètres par jour, qu'il pleuve, qu'il neige, ou qu'il vente. En réalité, les choses sont évidemment plus compliquées. On démarre généralement plus lentement, et le rythme s'accélère ensuite. Il ralentit aussi notablement dans la Sierra Nevada, du fait des difficultés et du dénivelé. Il convient en outre de prendre en compte les zero days. Si vous vous arrêtez pendant 20 jours au total, disons, cela fera autant à rattraper les jours où vous marchez.
De surcroît, en réalité, rares sont les hikers qui prennent 180 jours. Halfmile a fait des statistiques à partir de plusieurs journaux de randonneurs. Il estime que la grande majorité met 150 jours pour parcourir le PCT. À ce rythme, sans compter les éventuels zero days, cela représente une moyenne de 28,5 km par jour. Et comme tout le monde prend des journées de repos, vous avez devant vous un parcours de 150 fois une bonne trentaine de kilomètres de montagne. La barre est haute.
Pour ce qui me concerne, au vu de mon obsession photographique, également responsable d'un certain surpoids de mon sac, je ne compte pas battre des records. Je n'en vois guère l'intérêt, d'ailleurs. Cheminer, savourer, s'émerveiller, témoigner, partager, méditer, apprendre. Et en fin de compte, tenter de parvenir au Canada avant d'être bloqué par la neige.


Neil vient quant à lui de publier son expérience, concernant son thru-hike de 2011. C'est un exemple parmi d'autres...


"Bonjour à tous. Après avoir beaucoup réfléchi, tout à la fois sur le sentier et après coup, à propos du timing de mon parcours en 2011, je voudrais partager un peu de l'expérience acquise. J'ai donc démarré le 22 avril 2011, avec la vague idée de terminer la troisième semaine de septembre. Eh bien, au fur et à mesure, mon temps semblait dévoré dans les villes de ravitaillement. J'adorais les pauses ravitaillement. J'ai adoré boire des bières, manger comme un malade, et par-dessus tout, traîner en compagnie des autres randonneurs. Et comme l'année écoulée était une année d'enneigement record, ça ne semblait pas un problème d'arriver dans la Sierra un peu en retard. Je ne me sentais donc pas pressé de parvenir à la Sierra en respectant mon calendrier prévisionnel du 10 juin. J'ai fini par y arriver le 17 juin. Le rythme a rapidement dû changer, des journées à 30 km paraissaient alors surréalistes. De plus, je voulais traverser la Sierra depuis des années, alors pourquoi se précipiter, et la neige nous ralentissait de toute façon. Nous avons atteint Tahoe le 25 juillet, environ deux semaines en retard par rapport à mon plan schématique. Ça s'est amélioré du côté de la neige au nord de Tahoe, et elle a quasiment disparu à partir de Sierra City, Dieu merci! Lorsque nous avons quitté Sierra City le 3 août, nous étions encore seulement deux semaines en retard. Mais soyez prudents, parce que la Californie du Nord est tellement vaste qu'elle va vite dévorer votre temps. Entre les arrêts sympas en ville et un ralentissement sur le sentier, nous n'avons pas quitté Ashland, en Oregon, avant le 3 septembre. C'est là que je me suis rendu compte a posteriori, avec une grande frustration, que nous étions loin derrière la majorité des autres randonneurs. Alors que la plupart abattaient  des journées à 45 km, nous n'en étions qu'à 35.


Nous avons repris du rythme en traversant l'Oregon et avons adopté une moyenne de 45 km par jour, mais alors beaucoup de randonneurs essayaient d'accomplir ce qu'ils appelaient le challenge d'Oregon — la totalité de l'Oregon en 14 jours. Nous n'avons donc jamais pu regagner de terrain sur les autres.


Nous avons quitté Cascade Locks pour entrer dans le Washington le 3 octobre, après que beaucoup aient terminé. À la fin, nous avons donc rencontré de très mauvaises conditions, y compris de la neige comparable à celle de la Sierra. Mais le problème était qu'il ne faisait plus aussi doux que dans la Sierra. Nous avons finalement terminé le 26 octobre, beaucoup plus tard que prévu et beaucoup plus tard que les autres. Je pense de toute évidence qu'il est possible de terminer après le 1er octobre, mais vos chances diminuent nettement. Il semble que tout le monde se heurte au mauvais temps dans le Washington, ça fait partie du jeu, mais si vous y parvenez tôt, ce sera de la pluie, alors que si vous y arrivez plus tard, ce sera la neige, qui pose de gros problèmes."


Photo Mike Smith (pcta.org)

Photo Randy & Diane Bren (pcta.org)


1 commentaire:

  1. Salut !

    ... encore un qui a voulu prendre son temps en 2011 pour ne pas arriver trop tôt dans la Sierra ! Résultat : Il a quand même eu de la neige dans la Sierra (mais peut être pas assez pour qu'il y ait des ponts de neige par dessus les rivières) + il en a aussi eu dans le Washington en octobre ! Il a tout gagné ! ...
    D'un autre côté, il a bu pas mal de bières en zero day aussi. C'est pas mal non plus ! Eh eh eh !

    A méditer tout de même.

    Enfin, il n'y aura pas ce genre de problème en 2012 apparemment ! Y'a pas d'neige !!!

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