vendredi 10 février 2012

Cherchez la petite bête


"C'est une question de propreté: il faut changer d'avis comme de chemise".
Jules Renard

"En close bouche, n'entre point mouche."
Prosper Mérimée



La question de l'hygiène préoccupe beaucoup les membres du forum pct-l ces jours-ci. Ils n'ont sans doute pas tort. C'est un problème. Évidemment, ils paient ainsi en partie les rigueurs de leur philosophie ultra-légère qui leur interdit d'emporter de quoi se laver à peu près sérieusement sous prétexte qu'une savonnette est trop lourde ou risque de polluer l'environnement.
On commence d'abord par le fait que les hikers n'emportent qu'un seul jeu de vêtements, qu'ils n'ont la possibilité de laver que très épisodiquement, lors des ravitaillements en ville. Ça, je le conçois bien, le poids de vêtements de rechange serait trop important. J'ai même lu récemment le récit d'une randonneuse qui expliquait que ce n'était pas terrible de randonner pendant des jours et des jours avec le même jeu de sous-vêtements, et qu'elle avait finalement choisi... de ne plus en porter.
Mais il est de surcroît hors de question, tabou, no way, off limits, n'y pensez même pas, absolument interdit, d'envisager de se laver dans un cours d'eau ou un lac, pour cause de risque de pollution. La philosophie dominante est — et c'est une bonne chose — LNT, Leave No Trace, on ne laisse aucune trace. Vous imaginez la gueule qu'ils feraient s'ils vous voyaient vous shampouiner dans un lac en chantonnant? Je dois avouer que dans une vie antérieure, il m'est arrivé de me baigner dans des lacs où flottaient des blocs de glace pour me faire une beauté (rude tâche!), ou de me laver dans des torrents, mais je sais bien que ce n'est plus vraiment la mode.
Dès lors, tenter de se laver loin d'un cours d'eau, comme préconisé, se heurte à des problèmes de logistique enfantins, même si vous avez une savonnette. Comment disposer d'eau loin du torrent ou du lac? On ne se promène pas sur le PCT avec une bassine, ou une douche. J'en ai une, pourtant, mais elle pèse 200g, et c'est malheureusement trop. Si, si.
Il y a aussi le problème des passages aux toilettes au fond des bois qui sont une source majeure de contamination. Au point qu'on conseille de ne jamais prendre avec les doigts, ni quoi que ce soit d'autre, d'ailleurs, les délicieuses cacahuètes qu'on vous offre gentiment dans un sac, parce que le randonneur qui vous les propose, lui, y a mis SES doigts. Certains rechignent même à serrer la main de ceux qu'ils rencontrent, par prudence. Même si les Américains se serrent rarement la main et préfèrent un sonore "hi!", la main levée, nettement plus hygiénique. Nombre de hikers n'emportent pas de savon, ni même de kleenex pour se moucher.
Tout ça ne relève, au final, pas forcément de la psychose. Il est évident qu'on détecte un thru-hiker à distance à sa redoutable odeur et que le niveau de crasse qu'on y atteint peut être impressionnant. Il vaut peut-être mieux prendre quelques précautions élémentaires pour limiter les dégâts. Le gel hydroalcoolique pour les mains semble devenir un article incontournable, les lingettes bébé aussi. Elles peuvent vous éviter de douloureuses irritations.
Enfin, les torrents sont, pour la plupart, contaminés par différentes petites bestioles, dont la plus répandue est giardia lamblia, un protozoaire qui provoque des troubles intestinaux particulièrement sévères. Filtrer l'eau n'est vraiment pas un luxe. Et je ne parle pas des plantes vénéneuses qui peuvent transformer l'épiderme en steak haché.

Les ours et les pumas ne sont peut-être pas le danger le plus important, après tout.

Elle est en vente aux États-Unis:
Poudre anti-cul de singe...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire