"Oh, it’s raining today! Where is my umbrella?" Va placer cette phrase dans un voyage aux États-Unis, tu vas voir comme tu vas galérer. Toutes les fois où j’étais à New York, je me disais : " J’espère qu’il va pleuvoir, je vais te placer l'umbrella vite fait".
Gad Elmaleh, L'autre, c'est moi, 2005
Commander un sac sur mesures à Dan McHale, à Seattle, est un choix discutable. Peut-être pas contestable. En tout cas, je l'assume. Totalement. Je ne suis pas le seul à l'avoir fait, loin s'en faut. Même sur le PCT.
Mais comme je veux bien admettre que ça puisse paraître étrange, comme démarche, je vais donner des explications. Pas des justifications.
Dan McHale est un grimpeur / randonneur américain. Un autre dingue de la trempe de Ray Jardine. Il a d'ailleurs beaucoup grimpé à Yosemite, y compris en solo, le plus dangereux. Premières ascensions d'El Capitan à 19 ans, en 1972. Mais il n'était pas très intéressé par la ferraille, les pitons et les coinceurs. Lui, son truc, c'étaient les sacs.
Dan après El Capitan
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Dan a constaté que les sacs du commerce souffraient de quelques déficiences. Et le sac, pour un montagnard, c'est le stylo de l'écrivain, du moins à l'époque lointaine où ils écrivaient encore à la plume.
Il a donc conçu ses propres sacs et créé une entreprise artisanale. Ils sont deux, chez McHale. Mais ils vendent dans le monde entier, depuis plus de 30 ans. Et un sac McHale d'occasion se vend au prix des truffes. Pas celles en chocolat, les autres.
Il faut dire que Dan est un artiste. Un perfectionniste fou. La qualité de ses sacs est assez étonnante. Sans parler de son atout maître: un système de portage bluffant.
Quand on est en affaire avec Dan, on est prié d'être patient, très patient. Et aussi serein qu'un adepte du Boudhisme vajrayana en pleine méditation. Il faut en effet affronter son site internet: un embrouillamini comme j'en ai rarement vu. Dans la rubrique "What's New", par exemple, on trouve des infos de 2002... Il vous demande de comprendre ce qu'est le Q-Bayo du P&G&Q ou de choisir entre le LBP P&G 37 ou 39. Il a un type de sac qui s'appelle UnLtd S-SARC P&G+1". Juré. Si, si. Dan justifie ce chaos en expliquant que c'est délibéré. C'est un cheminement initiatique. Il ne veut à aucun prix avoir pour clients ceux qui dégainent leur carte bleue et commandent d'un clic. Aucun risque de ce côté-là. Mais le mal de tête est garanti. Si vous parvenez à vous frayer un chemin sur son site, vous êtes dignes de partir sur le PCT sans GPS. Digne aussi qu'il vous prenne en considération. Dan, on l'amadoue d'abord, on lui envoie ses lettres de créance. Et il acceptera peut-être de vous faire un sac. C'est un peu comme passer commande chez Ferrari, en somme. S'il vous faut un sac pour la sortie du week-end prochain, ne lui écrivez pas.
Client de Dan McHale?
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Sur le PCT, naturellement, l'argument du poids a pris globalement le pas sur tous les autres. C'est l'alpha et l'omega des randonneurs UL. De sorte que nombre de fabricants (Gossamer Gear en est l'archétype) proposent des voiles de mariées en guise de sacs. Parfois au détriment du confort. Parce que dans la Sierra, vous êtes - que le vouliez ou pas - gravement plombé, par le matériel de haute montagne, par une dizaine de jours de nourriture, par le bidon anti-ours. Mais c'est vers ces fabricants évanescents que les sadhus se tournent en masse. Et EDF a beau répéter inlassablement un des leurs mantras, HYOH (Hike Your Own Hike, faites votre propre marche, en gros), il est parfois difficile de résister à la pression sociale. Porter des chaussures de "montagne" à la place des chaussures de sport qu'ils portent tous, c'est exposer aux quolibets et à la réprobation universelle. Même si je viens de lire ce matin un randonneur demander si ça leur paraissait vraiment rationnel de vouloir traverser une patinoire en tennis... N'oublions pas que gourou Ray est passé par là.
Ce que Dan explique, de son côté, c'est qu'il vaut mieux avoir un sac un peu plus lourd, mais prodigieusement bien conçu et confortable. Et à l'épreuve des bombes.
Lorsque vous traitez avec Dan, il commence par prendre les mesures, son mètre de couturier autour du cou. La distance entre la 2e vertèbre cervicale et la crête iliaque, la pointure de chaussures de votre maman, l'âge auquel vous avez sorti votre première dent. Il vous demande également des photos, votre sac sur le dos.
Ensuite, il vous envoie un sac d'essai, que vous êtes prié d'utiliser en montagne, toutes affaires cessantes. En faisant des photos. De la gueule que vous faites avec le sac chargé.
De fil en aiguille, c'est le cas de le dire, les choses s'affinent. Et vous pouvez un beau jour faire à Dan la liste de vos desiderata: le volume, les tissus, les couleurs, le petit pli d'aisance ici, les poches, et la boucle là. Ce que vous voulez, exactement. Pour votre sac. Rien de plus, rien de moins. Avec les grognements de Dan, en prime. Et un ajustage façon Chanel.
Vous l'aurez compris, il vaut mieux savoir très précisément ce que vous attendez de votre sac en montagne. Ce n'est pas Dan qui vous le dira.
Le sac vous est livré avec un DVD, pour vous apprendre à faire les subtils réglages. Et voilà, vous êtes l'heureux propriétaire d'une Ferrari; il ne reste plus qu'à passer la première, sans caler.
Le sac d'essai
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Ossau, 16 novembre 2011
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té sûr que tu pars sur ce truc de cinglés ? SOSSSSSSSS
RépondreSupprimerje m'attendais plutôt à voir des photos d'un sac en cuir old school...
RépondreSupprimerCeux-là, je les garde précieusement, et me contente de les regarder.
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