"Go through your phone book, call people and ask them to drive you to the airport. The ones who will drive you are your true friends. The rest aren't bad people; they're just acquaintances."
Jay Leno
Consultez votre carnet d'adresses, appelez tout le monde et demandez-leur de vous conduire à l'aéroport. Ceux qui sont d'accord pour le faire sont vos vrais amis. Les autres ne sont pas mauvais; ce sont juste des relations".
Il me reste beaucoup de travail de préparation en matière de logistique. Il va vraiment falloir que je m'y mette sérieusement.
Ce qui est en place, en revanche, c'est mon équipe américaine de soutien. Je veux profiter de cette occasion pour vous les présenter et rendre hommage à leur précieuse amitié:
Rob et Pamela m'offriront un camp de base à Long Beach. C'est Rob qui m'accompagnera au départ, à Campo, même s'il me juge "fucking crazy". Et il a même proposé de prendre l'avion pour l'État de Washington si d'aventure il fallait qu'il me traîne sur les dernières dizaines de kilomètres pour atteindre Manning Park.
Drôle d'histoire. J'ai un jour cherché un livre d'occasion sur internet. Minuit dans le jardin du bien et du mal. Je voulais absolument le lire et il était épuisé. En un clic, j'ai acheté mon livre, mais j'ai obtenu beaucoup plus que ça; j'ai en réalité gagné un ami extraordinaire. C'était Rob, le vendeur. Et notre solide amitié a commencé par un gentil mail de remerciement de Rob.
À Palm Springs, Richard — 17 ans d'amitié au compteur — est déjà à son poste, dans le désert, un bidon de jus d'orange à la main (Si Richard lit ça, il saura pourquoi je parle de jus d'orange...). Il s'est installé à Palm Springs pour sa retraite, comme beaucoup, pour profiter d'un climat dans lequel les mots "froid" et "pluie" n'existent pas.
Palm Springs est un endroit qui aurait beaucoup plu à John Wesley Powell, j'imagine... Situé en plein désert du Mojave, que le PCT longe, d'ailleurs. Au sud-est de Los Angeles. 48 000 habitants en 2009. Et en ce qui concerne les parcours de golf 18 trous dans le DÉSERT... 100!!! Vous avez bien lu. Les chiffres sont tellement dingues que j'ai pris une fois de plus la peine de vérifier. Et peut-être en ai-je oublié. Tu te demandes où passe l'eau du Colorado qui allait autrefois chez toi, amigo?
Bienvenue dans le désert.
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Si Geoff n'a pas perdu son téléphone ou son portefeuille, il devrait être disponible à Hollywood. Le seul Américain de la planète, sans doute, qui vive à Los Angeles sans voiture. Il est tellement rêveur qu'il ne s'est peut-être même pas rendu compte qu'il n'en avait pas, en fait. Geoff a vécu chez nous pendant un an quand il était adolescent. Il a réussi l'exploit de me donner l'impression que j'étais autiste, à voir le nombre hallucinant d'heures qu'il passait devant mon ordinateur à taper des articles pour le journal de son lycée américain.
Articles d'une remarquable pertinence, d'ailleurs. Et comme il n'était pas satisfait de la place accordée à ceux-ci dans le journal, voici ce qu'il leur a écrit:
Cher Rédacteur en Chef,
Je suis un fan de The Laker et j’y verse une cotisation. Je suis abonné depuis son démarrage l’année dernière. Eh bien, depuis que j’ai commencé à le lire, je suis tombé amoureux des talents incroyables tels que Geoff Altrocchi. Quand j’ai appris qu’il allait être en France cette année j’ai failli renoncer à mon abonnement. Et puis j’ai éprouvé une joie inimaginable quand j’ai entendu qu’il allait entamer une correspondance avec “The Laker”. Ma seule déception c’est que vous l’avez mis à la fin du journal! Dans le numéro de mardi 13 Février 1996, vous l’avez mis véritablement sur la dernière page avec les publicités! Ca a vraiment bouleversé tout son fan club. Vous auriez pu au moins avoir la bienséance de le mettre quelque part au milieu. Je sais qu’il n’est même pas là et il ne verra probablement jamais le journal (le pauvre, il se croit probablement sur la première page chaque fois) mais s’il vous plaît, pour faire plaisir au fan club de Geoff Altrocchi, rendez justice à un authentique grand écrivain américain en évitant de mettre son prochain article en page 8!!!
Signé,
Le président de G.A.F.C. (the Geoff Altrocchi Fan Club)
Ah, un détail. Quand il est arrivé pour passer son année en France, à l'âge de 17 ans, Geoff ne savait pas faire une seule phrase en français.... Au bout de quelques mois, à peine, il écrivait ses articles à la fois en anglais et en français. Faut dire qu'à la rentrée, on avait commencé par lui faire étudier les Contes Philosophiques de Voltaire! Traitement de choc. J'ai juste fait un copier-coller de ce qu'il avait écrit. Rien modifié. À la fin de l'année, il a produit un recueil et... l'a vendu à ses copains de classe! Et il avait son émission de radio hebdomadaire sur une station locale! Vous voulez que vos enfants apprennent une langue étrangère? Maintenant, vous savez ce qui vous reste à faire. Avouez que vous aimeriez pouvoir écrire en anglais comme Geoff était parvenu à le faire en français.
J'en profite quand même pour dénoncer un scandale: on m'a piqué mon ordinateur pendant un an!
Geoff m'aura marqué, c'est le moins que je puisse dire. Allez, encore un exemple. À la fin de l'année, dans son recueil, Geoff's World, il a rédigé le bulletin trimestriel de tous ses copains de classe, et même des profs. En français, bien sûr. Je vous en livre juste deux:
L***** Stéphanie: Coiffure originale. Goûts très élevés en littérature. La seule inquiétude est le plaisir qu’elle prend en lisant Balzac. On conseille une thérapie psychiatrique.
Goût en littérature (à part Balzac) 20/20
Goût en littérature Balzacienne 2/20 (Il est interdit dans “Geoff’s World” d’aimer Balzac)
Moyenne 11/20
F***** Géraldine: Tendance à sortir avec des copains trois fois plus grands qu’elle, toujours très coopérative dans la recherche d’une copine pour Geoff
Note en recherche d’une copine pour Geoff 0/20
Moyenne 11/20
À Reno, dans le Nevada, je pourrai compter sur Phil et Karen, qui pourraient venir me récupérer à Donner Pass. Vous savez qui est Phil désormais. Celui qui sourit beaucoup. Karen, quant à elle, travaille pour le Gouverneur du Nevada, Brian Sandoval, à Carson City. Elle est "risk manager". Son boulot est de mesurer le coût réel, dans tous les domaines, des décisions que le gouverneur voudrait prendre. Et, en quelque sorte, d'assurer la protection des biens du Nevada, y compris en personnel.
Et à Reno, encore, il y a Laurel et John. Il est déjà prévu que John pose le bouquin qu'il a toujours en main et vienne m'attendre à Carson Pass en juillet prochain, avec une douche portable, des boissons fraîches et... un orchestre! Je vais pouvoir aller gagner au casino le temps d'une halte dans ce Nevada qui m'est si cher.
John est un personnage de roman. C'est le père de Geoff, accessoirement. Ancien de Harvard, il était prof de psychiatrie à l'Université de Duke, puis à celle du Nevada, où il a participé à la fondation de la Faculté de médecine. Spécialiste des dédoublements de personnalité. Un immense sens de l'humour, une énergie débordante et une curiosité intarissable. John a cessé d'enseigner à 75 ans. Pareil pour le ski. Ça a dû être un crève-cœur pour lui. Tous les matins, il se lève avant l'aube et s'installe dans son fauteuil devant une large baie, une pile de journaux et de livres à portée de crayon. Fin août, j'étais chez eux et John lisait cinq livres en même temps. "Mon Dieu!" comme dit tout le temps John, en Français dans le texte...
Si je trouve le moyen de les rejoindre et si j'ai besoin d'un bon break, je serai accueilli chaleureusement, comme d'habitude, par Sharry et Paul à San Rafael, un endroit merveilleux dans le nord de la Baie de San Francisco. Sharry enseignait le Français à Sparks, dans le Nevada. Sharry signe ses mails par "Love across the mountains and waters". Ça ne vous toucherait pas, ça? Quant à Paul, c'est sa vie qui est un roman. Qui n'a pas toujours été très joyeux, d'ailleurs. Mais je ne pense pas que ce soit ici le lieu d'évoquer son histoire. Paul était prof de littérature française à l'Université de Californie à San Francisco. Peut-être le seul Américain à posséder l'intégralité de la Bibliothèque de la Pléiade dans son bureau. Il adore — comme moi, d'ailleurs — qu'on lui demande s'il les a tous lus, ces livres... C'est toujours un bonheur de les retrouver. Il se pourrait que j'éprouve le besoin irrépressible de m'arrêter quelques jours quand je serai dans le nord de la Sierra Nevada.
Enfin, à Eugene, en Oregon, Jane (une déjantée membre d'EDF qui, à 75 ans, fait de la course à pied) a poussé la gentillesse jusqu'à renoncer à partir de chez elle pour être à ma disposition quand j'approcherai de sa région. Jane a parcouru le Pacific Crest Trail, et prépare le Sentier de Saint-Jacques de Compostelle. Là, le camp de base sera chez nous, of course. Ses projets ont pris du retard parce qu'elle s'est pété le col du fémur en glissant sur un trottoir au printemps. Mais aux dernières nouvelles, elle a repris l'entraînement...
Ces merveilleux amis sont ma dream team de trail angels personnels, rien que pour moi. J'ai, encore, énormément de chance. Il m'est arrivé d'atterrir une fois aux États-Unis et d'y être accueilli par... 14 amis et de partir tous ensemble au resto. Leur présence réchauffe le cœur et donne envie d'avancer. Elle me donne surtout envie d'aller aux États-Unis le plus souvent possible. J'ai quelques modèles de cinglés intéressants dans cette liste de gens que j'aime. Et puis, un orchestre m'attend à Carson Pass!
"You're fucking crazy, you know?"
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Il y a un autre Américain qui m'offrira son soutien pendant ce parcours. Vous le connaissez un petit peu, maintenant. Il s'appelle John Muir.
John Muir.
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Le blog de John Muir.
Tu déconnes, John!
"Mountains holy as Sinai. No mountains I know of are so alluring. None so hospitable, kindly, tenderly inspiring. It seems strange that everybody does not come at their call. They are given, like the Gospel, without money and without price. ‘Tis heaven alone that is given away'."
John Muir
"Des montagnes aussi sacrées que le Sinaï. Aucune autre montagne que je connais n'a autant d'attraits. Aucune n'est aussi hospitalière, ni n'offre l'inspiration avec tant de douceur et de tendresse. Il est étrange que tout le monde ne réponde pas à leur appel. Elles s'offrent, comme l'Évangile, gratuitement. "Il n'y a que le Paradis que l'on gagne ainsi".
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Nous n'avons pas eu la chance de voir Palm Spring et le paysage de la photo "Bienvenue dans le désert" ! Mais faut pas louper Warner Spring en tout cas !!!
RépondreSupprimerC'est super, tu vas avoir des amis tout le long du chemin !